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Chroniques du misanthrope
1 juillet 2010

Lucian Freud

Il y a de nombreuses raisons pour s’intéresser au peintre Lucian Freud exposé au Centre Pompidou du 10 mars 2010 au 19 juillet 2010. Le plus grand peintre vivant du monde, disent certains. Ce n’est évidemment pas la bonne raison.

Lucian Freud est un peintre qui a changé plusieurs fois de style et de technique, se remettant en cause, évitant en partie une autosatisfaction qui le guettait (s’entendre dire, de son vivant, qu’on est le plus grand peintre du monde, ce n’est pas rien…). Cette remise en question dans son art – et sur le marché de l’art – est assez rare. Malheureusement l’exposition de Beaubourg ne rend pas bien compte de cette disposition de l’artiste.

Lucian Freud est un peintre qui cherche et qui, comme tel, ne trouve pas toujours ; il y a des plantages (Enfant nu riant – non présenté à Beaubourg -, Portrait de Sa Majesté la reine – non présenté non plus – une croute immonde, entre nous…) et les plantages ce n’est pas non plus si courant.

Freud est un peintre remarquable pour l’originalité de ses représentations spatiales. Le point de vue du peintre est rarement à hauteur d’homme, très souvent l’angle de vue est une plongée ou une contre-plongée, une vision d’en haut (l’admirable Reflet avec deux enfants) ou d’en bas (Jeune fille dans une embrasure de grenier).

Il y a, enfin, le pinceau (plus exactement la brosse) du peintre, notamment pour les toiles des années 80/90. Des coups de brosse bien visibles qui donnent force et vitalité à la toile au point que l’on dirait que le peintre vient juste de terminer son œuvre. C’est une des raisons qui fait que l’observation réelle d’une peinture est essentielle pour ressentir celle-ci ou toute œuvre d’art.

Il y a pourtant chez Lucian Freud des points détestables. Par exemple ses « compromissions » avec les musées. Il a réalisé de mauvaises toiles en voulant rendre hommage à des Maîtres. C’est en 1980, à la demande de grands musées, qu’il se prête au jeu de la relecture des Classiques (Chardin, Cézanne, Constable). Ces toiles sont regroupées dans la salle 3 de l’exposition de Beaubourg. Cela n’apporte rien, ni à Freud, et encore moins aux Classiques… De même, en 2002, Freud a fait le portrait de l’insipide Kate Mose. De quoi plaire au journal Les Inrockuptibles ou à cette ruine nommée Lagarfeld, mais cela ressemble pathétiquement à « la toile de trop », à la brindille qui voile l’œil du peintre, d’autant que la toile en question tombe dans l’autocitation. Le naufrage n’est pas loin…

Il y a, de fait, toutes ces dernières toiles des années 2000. Les couches de peinture s’épaississent, les portraits s’encroûtent, les visages s’entartrent, se couvrent de plâtre (on est loin du tableau Deux lutteurs japonais près d’un lavabo, chef d’œuvre absolu et présent à l’exposition), il y a des grumeaux dans la peinture, l’ensemble devient plus graisseux que lumineux. Parce qu’à force de vouloir être dans la chair et la matière, on s’embourbe, Lucian Freud est arrivé au bout du chemin...



L'exposition de Beaubourg se termine avec des photographies de David Dawson au sein de l'atelier de Freud. Il y en a une qui m'a fait immédiatement penser à une toile de Mariano Fortuny (1838-1874) vue lors d'une exposition au Prado à Madrid.

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